Eduardo Kac ne peut pas être défini par un médium. Performance, graffiti, minitel, fax, slow-scan, holographie, poésie numérique, télérobotique, internet, biotechnologie, sa création repose non pas sur une technologie mais sur des concepts qui trouvent leur expression dans les technologies actuelles. Havoc, holopoem, 1992 Né à Rio de Janeiro en 1962, Eduardo Kac effectue la première partie de sa carrière artistique dans son pays natal avant de s'installer à Chicago en 1989 où il enseigne à la School of the Art Institute. Il participe à de nombreuses expositions dans le monde entier et ses oeuvres figurent notamment dans les collections du Museum of Modern Art de New York, du musée de l'holographie de Chicago et du musée d'art moderne de Rio. S'intéressant aussi bien aux supports visuels qu'écrits, il est également engagé dans un travail de publication et collabore régulièrement à Leonardo et Visible Language. Eduardo Kac est un défricheur, position qu'illustrent parfaitement trois exemples parmi ses Ïuvres : l'holopoésie (1) la téléprésence et la biotélématique (2). Au début des années 80, les caciques annoncent la fin de la poésie. Pour Kac, qui explore la littérature expérimentale, il est clair que le cadre de la page a atteint ses limites. Les mots doivent s'étendre dans les trois dimensions de l'espace physique. L'holographie lui permet de réaliser cette architecture de mots, immatérielle, mobile, fluide ; il invente l'holopoésie (3) en 1983. A la même époque (1985), il développe des oeuvres de poésie animée sur le minitel (4). Une oeuvre dialogique Un des concepts-clés d'Eduardo Kac est celui d'hybridation, d'oeuvre dialogique. Le corps -- la présence -- est par ailleurs un des éléments récurrents de son travail depuis ses premières performances sur les plages de Rio. Cette approche trouvera son aboutissement dans Ornintorrinco, série d'oeuvres de téléprésence qu'il développera aux Etats-Unis (88-98) en collaboration avec Ed Bennett. Ornintorrinco est un robot autonome, contrôlé à distance via le téléphone puis Internet, corps de substitution partagé, «habité», par le public participant. Donner une forme artistique à la complexité est le fondement de l'oeuvre d'Eduardo Kac. Ainsi, incorporer dans une même création les différents espaces (physiques et virtuels), rendre à la relation corps/esprit toute sa dimension et sa richesse de connections et d'interpénétrations, associer les différentes composantes du vivant (humaines, animales, mais également les hybrides en émergence), s'inscrire dans et inscrire cette nouvelle écologie où les systèmes organiques et technologiques se fécondent mutuellement sont les paramètres sur lesquels s'organisent ses dernières créations. Pour les qualifier, il a inventé le terme de biotelématique. Mentionnons Teleporting of an Unknown State (1996) où une graine pousse grâce à la lumière envoyée par les internautes par le biais de leur webcam et A-positive (1997), «échange de vie» entre un humain et un robot. Eduardo Kac est un artiste actuel, au sens fort du terme, non pas parce qu'il utilise les technologies de son époque ou parce que toutes ses oeuvres incluent un aspect politique et social subtil mais, parce qu'il invente de nouvelles formes artistiques et établit une proposition esthétique sur le monde. (1) On retrouvera une documentation complète sur le travail de Kac sur son site web : http://www.ekac.org (2) Terme inventé per l'artiste. (3) L'holopoésie n'est pas la réalisation de poèmes holographiques, «clichés» d'un texte statique préexistant mais la création d'une poésie dynamique dans l'espace et définie par le temps dans laquelle le lecteur compose le sens selon son propre déplacement. (4) Le Brésil a acquis la technologie française dans toute sa dimension, c'est-à-dire permettant un graphisme plus riche et incluant la couleur, solution qui n'a pas été implémentée en France. Annick Bureaud est critique d'art, spécialiste des nouvelles technologies.
| | No one medium can hold Eduardo Kac. His work ranges from body-based performance art and graffiti to the use of fax machines, slow-scan, digital poetry, telerobotics, the Web and biotechnology. In Kac's art what matters is not the storage medium but the concepts which, in his case, can only be expressed through the use of new technologies. Ornitorrinco, Kac & Bennett. 1989 Born in 1962 in Rio de Janeiro, Eduardo Kac spent the first part of his artistic career in Brazil before coming to Chicago in 1989. He now teaches at The School of the Art Institute. His work has been shown in many exhibitions around the world and is featured in the collections of such institutions as the Museum of Modern Art in New York, Chicago's Holography Museum and the Modern Art Museum in Rio. Somehow he finds time to publish copiously as well; Leonardo and Visible Language are among the journals to have carried his texts. Kac is a pioneer, to put it mildly. He more or less invented three of the media he likes to work in: holopoetry,(1) telepresence and biotelematics.(2) At the beginning of the '80s, when poetry was (once again) pronounced dead, Kac took the pronouncement as a challenge. His explorations of experimental verse (one of his favorite poets is e. e. cummings) led him to the conclusion that the two-dimensional page was, indeed, exhausted, and he decided to write his words in the three dimensions of real space. Holography made it possible to create an immaterial and mobile architecture of words, and a new visual syntax. He coined the word holopoetry for this work in 1983.(3) Two years later, he put out animated poems on Brazil's minitel system.(4) Dialogical Artworks One of Kac's key concepts is hybridization, dialogical artworks. The body and its presence has also been a recurrent theme in his work since his first performances on the beaches of Rio. This approach would eventually lead to Orintorrinco, a series of telepresence works created in the U.S. with the collaboration of Ed Bennet (1988-98). Ornintorrinco is a robot remote-controlled by telephone (and also the Internet), a substitute body shared and "inhabited" by the participating public. The search for artistic expressions of complex concepts is what Kac's work is all about. He incorporates different spaces (physical and virtual) into a single piece so as to render the relationship between the body and the mind in all its richness of connections and interpenetrations and produce a new ecology where organic and technological systems cross-pollinate. He had to invent a term, biotelematics, for his latest works, pieces like Teleporting AnUnknown State (1996), where a seed sprouts thanks to a light sent via the Internet by means of a webcam, and A-positive (1997), an "exchange of lives" between a human and a robot. A New Aesthetics Kac is a man of his times in the literal sense, not because he uses the latest technologies or because all his work is tinged with subtle political and social critique, but because he is inventing new art forms and bringing a new aesthetics into the world. Translation, L-S Torgoff (1) For views of Kac's work and full documentation, see his site: http://www.ekac.org (2) A term invented by the artist. (3) Holopoetry does not consist of holograms of traditional static versification; rather it is the creation of a dynamic poetry where beholders' readings (in both the literal and figurative sense) change as they move. (4) France's minitel system, a phone-computer appliance to read information on a central server by means of software resident on that server, never went beyond teletext in that country. Brazil bought into this technology and developed its graphical dimension. Annick Bureaud is an art critic specializing in new technologies.
|